Bilan de compétences et CPF : faut-il vraiment s’inquiéter ?
Depuis quelques mois, le débat autour du Projet de Loi de Finances (PLF) 2026 a enflammé le secteur de la formation.
En cause : l’article 81, qui modifie le Code du travail et semble retirer le bilan de compétences de la liste des formations éligibles au CPF (Compte Personnel de Formation).
Mais derrière les titres alarmistes, la réalité est plus nuancée. Chez Formités, nous avons analysé les textes officiels, les débats en cours et les réactions des acteurs du secteur. Voici ce qu’il faut retenir, sans panique, mais avec vigilance.
Ce que dit le texte officiel du PLF 2026
Le Projet de Loi de Finances pour 2026, déposé le 14 octobre 2025 à l’Assemblée nationale (projet n° 1906), comprend un article 81 intitulé :
« Diverses mesures relatives à la régulation du financement du compte personnel de formation (CPF). »
Cet article propose de modifier l’article L.6323-6 du Code du travail, qui énumère les actions de formation éligibles au CPF.
Plus précisément, il prévoit de supprimer le 2° du II de cet article, alinéa correspondant actuellement aux bilans de compétences.
Autrement dit, le texte ne dit pas explicitement “le bilan de compétences est exclu du CPF” ; il procède par suppression de la ligne qui rendait cette action éligible.
Le résultat serait néanmoins le même : le bilan de compétences ne figurerait plus dans la liste légale des formations financées via le CPF.
L’article 81 autorise aussi le gouvernement à fixer par décret les plafonds d’utilisation et les conditions d’éligibilité pour certaines actions, y compris celles « non certifiantes ».
Pourquoi cette modification ?
Selon l’évaluation préalable jointe au PLF 2026, cette mesure s’inscrit dans un objectif de régulation budgétaire et de lutte contre les dérives observées sur le marché du CPF.
Quelques chiffres :
- En 2024, près de 83 000 bilans de compétences ont été financés via le CPF, pour un montant global de 162 millions d’euros ;
- Le coût moyen d’un bilan est évalué à 1 946 €, soit un coût horaire huit fois supérieur à celui d’une formation certifiante (RNCP).
- La Caisse des Dépôts a également signalé des fraudes et un taux de satisfaction hétérogène selon les prestataires.
L’intention affichée du gouvernement n’est donc pas de « supprimer le bilan de compétences », mais de réorienter les financements CPF vers les actions qualifiantes et mieux encadrer les dispositifs non certifiants.
Ce que cela signifie
Ce qui est acté à ce jour
- Le texte déposé contient bien la suppression du 2° de l’article L.6323-6, ce qui retirerait le bilan de compétences de la liste légale des actions éligibles au CPF.
- Le PLF est désormais examiné à l’Assemblée nationale, en commission puis en séance publique. L’article 81 figure dans la seconde partie du texte, qui sera débattue début novembre 2025.
- Le gouvernement prévoit de fixer les futurs plafonds et conditions d’éligibilité du CPF par décret, ce qui pourrait redéfinir partiellement les règles.
Ce qui n’est pas encore décidé
- Rien n’est voté. Le PLF 2026 n’a pas encore été adopté ; l’article 81 peut encore être modifié, amendé ou supprimé.
- Les droits CPF des titulaires restent inchangés pour l’instant : il est toujours possible de financer un bilan de compétences via MonCompteFormation.
- Plusieurs amendements (en préparation ou annoncés) visent à :
- supprimer purement et simplement l’article 81 ;
- rétablir le bilan dans la liste du Code du travail ;
- ou le maintenir sous conditions : durée maximale, publics prioritaires, plafond spécifique ou exigences qualité renforcées.
- Des amendements transitoires pourraient aussi prévoir une période d’adaptation ou la validation des dossiers en cours.
En résumé
Le PLF 2026, dans sa forme actuelle, prévoit une sortie du bilan de compétences du CPF, mais aucune décision n’est définitive.
Le débat parlementaire qui s’ouvre pourrait aboutir à un compromis : maintien partiel, encadrement par plafonds, ou réécriture de l’article.
Les positions en présence
Les arguments du gouvernement
Le ministère du Travail et des Finances défend une logique de maîtrise des dépenses et de renforcement de la qualité des formations.
Selon lui, certaines actions non certifiantes, dont le bilan de compétences, ont parfois dérivé vers un usage « de confort ».
L’idée : recentrer le CPF sur les formations certifiantes inscrites au Répertoire Spécifique (RS) et au Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP), qui deviennent désormais la priorité du gouvernement en matière de financement CPF, et laisser les bilans de compétences à d’autres modes de financement (employeurs, OPCO, dispositifs régionaux…).
Les réactions du secteur
Les réseaux professionnels et les organismes de formation se mobilisent pour défendre la valeur du bilan de compétences :
- outil d’orientation active ;
- levier de prévention de l’usure professionnelle ;
- passerelle efficace vers la reconversion et les parcours qualifiants.
Une pétition citoyenne a été déposée sur le site de l’Assemblée nationale et plusieurs questions écrites de députés demandent au gouvernement de maintenir le dispositif, au moins pour certains publics (reconversion, seniors, salariés fragilisés).
La dynamique parlementaire
Au 24 octobre 2025, plus de 1 700 amendements ont été déposés sur l’ensemble du PLF 2026.
La seconde partie, qui contient l’article 81, n’a pas encore été examinée : plusieurs groupes politiques envisagent de défendre le maintien du bilan, soit par un rétablissement dans le Code du travail, soit via un encadrement par plafonds ou critères qualité.
Le texte pourrait donc évoluer significativement avant son adoption finale, prévue fin décembre 2025.
Que faire pour le moment ?
Pour les bénéficiaires du CPF :
- Tant que la loi n’est pas adoptée, le bilan de compétences reste mobilisable.
- Il est donc possible et pertinent d’engager un bilan dès maintenant, afin de sécuriser le financement actuel.
Pour les organismes de formation :
- Restez attentifs aux amendements déposés sur l’article 81 ;
- Préparez-vous à des scénarios d’ajustement : plafonds, ciblage, exigence accrue de traçabilité ou d’accréditation ;
- Continuez à valoriser le bilan comme outil de professionnalisation et non comme prestation de confort.
- Anticipez l’évolution du CPF en travaillant à la certification de vos parcours (RS ou RNCP), afin de garantir leur éligibilité et leur pérennité dans les dispositifs de financement à venir.
Conclusion
À ce jour, le bilan de compétences reste pleinement éligible au CPF.
L’article 81 du Projet de Loi de Finances 2026 propose de le retirer du Code du travail, mais aucune décision n’a encore été votée. Le texte est en cours d’examen parlementaire et pourra encore évoluer au fil des amendements.
Chez Formités, nous rappelons qu’aucune suppression n’est actée et que plusieurs scénarios demeurent possibles : maintien, encadrement ou révision du dispositif.
Il n’y a donc aucune raison de céder à la panique.
Notre mission est d’assurer une veille rigoureuse et factuelle, pour offrir à nos lecteurs une compréhension claire et actualisée des enjeux législatifs.
Dans ce contexte, les formations certifiantes RS et RNCP deviennent des repères essentiels pour garantir la qualité et la pérennité des parcours professionnels. C’est pourquoi Formités accompagne les organismes de formation dans la structuration, l’inscription et la valorisation de leurs certifications, afin de préparer dès maintenant les évolutions du financement CPF.
D’ici au vote définitif, restons attentifs, mesurés et confiants dans la capacité du débat parlementaire à trouver un équilibre entre régulation et accompagnement des parcours professionnels.
FAQ : Bilan de compétences et CPF 2026
Le bilan de compétences sera-t-il vraiment supprimé du CPF en 2026 ?
Pas forcément. Le Projet de Loi de Finances 2026 (PLF 2026) prévoit de modifier le Code du travail, ce qui pourrait retirer le bilan de compétences de la liste des formations éligibles au CPF.
Mais le texte n’est pas encore voté : des amendements sont en discussion pour maintenir ou adapter le dispositif. Rien n’est donc définitif à ce jour.
Puis-je encore utiliser mon CPF pour financer un bilan de compétences en 2025 ?
Oui. Le bilan de compétences reste actuellement finançable par le CPF. Tant que la réforme n’est pas adoptée, vous pouvez mobiliser vos droits CPF pour engager un accompagnement.
Il est même conseillé de ne pas attendre, afin de bénéficier des conditions actuelles avant une éventuelle évolution du cadre légal.
Quelles conséquences possibles pour les salariés et les organismes de formation ?
Si l’article 81 du PLF 2026 est adopté en l’état, le bilan de compétences pourrait ne plus être financé par le CPF. Cependant, il pourrait rester accessible via d’autres financements (employeurs, OPCO, dispositifs régionaux). Pour les organismes de formation, cela impliquerait de s’adapter à de nouveaux modes de financement et à un encadrement plus strict (plafonds, critères qualité, publics ciblés).
